mercredi 21 mars 2012

à propos de l'agriculture biodynamique: tribune libre



Un lecteur du Monde Magazine a bien voulu nous faire parvenir le texte complet d'un courrier des lecteurs qu'il a adressé au supplément hebdomadaire du journal du soir et qui a été reproduit partiellement (édition du 28 janvier).
Nous le reproduisons avec quelques précautions d'usage: notre association n'est compétente en matière ni médicale ni agronomique et ne saurait affirmer sans mauvaise foi que les produits issus de l'agriculture biodynamique seraient nocifs pour la santé ou agressifs pour le palais, ce qui semblerait d'ailleurs faux pour un consommateur ignorant. Cette insertion n'est donc nullement un appel à ne pas acheter ces produits!
En revanche, nous avions déjà signalé que derrière des résultats alléchants des activités qui se réclament de l'anthroposophie se dissimulait une doctrine ésotérique, ce qui semble confirmé par les extraits que nous tirons d'un hors série n° 12 de la revue BIODYNAMIS. Dans l'état actuel de notre recherche, seule cette dissimulation nous pose problème et nous sommes heureux qu'un lecteur du Monde ait apporté de l'eau à notre moulin.

Je suis de plus en plus déçu par la lecture pourtant attentive de votre magazine du samedi. Trop de publicité, de promotion des produits de luxe inabordables pour le lecteur "normal". Votre dernier Portfolio du Magazine du 20 janvier est à chier avec ces salles vides où est censé se décider l'avenir du monde avec Le Monde comme média. L'article sur les Bourguignon valorise un couple de "scientifiques" autoproclamés mais sans références dont vous alimentez le fond de commerce très lucratif vendant des conseils éculés à des agriculteurs déboussolés. L’agronomie est une science de la complexité et les charlatans qui voudraient nous faire croire le contraire doivent être dénoncés.
Mais mon ire est au paroxysme après la lecture de l'article de Laure Gasparotto "Il est bio mon vignoble". Elle y amalgame scandaleusement la culture biologique et la biodynamie.
L'agriculture raisonnée préconisant l'emploi "à minima" des engrais chimiques et des produits phytosanitaires est un progrès considérable par rapport à ce qu'on appelle couramment "l'agriculture chimique" développée et imposée depuis ½ siècle sous couvert de productivisme par les firmes des fournisseurs spécialisés.
Aujourd’hui, l'agriculture biologique est un objectif à atteindre. Elle assure la conservation des sols par des pratiques culturales adaptées aux différentes catégories de productions (grandes cultures, horticulture, cultures pérennes incluant la vigne) et une alimentation des plantes à base de déchets et déjections compostés de végétaux et animaux. Par contre, la protection « biologique » efficace de certaines plantes contre leurs maladies ou ravageurs demandera encore des recherches et des expérimentations longues avant d'envisager un passage total au "bio" dans des conditions économiquement supportables.
Ce n'est pas le cas pour la vigne dont la puissance végétative doit nécessairement être contrainte pour que la réduction des rendements favorise la qualité du produit transformé (transmuté, parfois trafiqué) qu'est le vin. C’est ce constat qui rend possible la culture biologique intégrale de la vigne destinée au vin. Mais cette conversion (qui nécessite 3 ans de transition) n'est pas un retour en arrière. Au contraire, elle exige une plus grande précision dans l'itinéraire technique nécessitant du producteur beaucoup plus de connaissances, d'observations, d'attention et de respect de l'environnement. Pour un vignoble arrivé à l'équilibre, le "bio" ne devrait pas renchérir les coûts de production ni, par ailleurs, en garantir la qualité comme il est bien dit dans l'article.
La culture biologique est l'aboutissement de l'équilibre entre la production d'aliments de qualité la plus grande possible et le respect de l'environnement et donc de sa conservation et de son enrichissement. Elle nécessite des recherches scientifiques, des expérimentations longues, un développement auprès des agriculteurs qui exige d'eux une formation solide, des pratiques nouvelles et un rapport à leur environnement révolutionné. La culture biologique est un sommet de rationalité. Par contre, il est inadmissible que l’auteure fasse l'amalgame entre le "bio" et la "biodynamie".
Car la biodynamie est un gouffre d'ésotérisme, un syncrétisme de pratiques magiques. C’est la primauté de l’obscurantisme, la négation de la connaissance des lois naturelles, de la science agronomique et biologique. Le comportement sectaire des intégristes de la biodynamie est comparable à d'autres sectarismes : complexification, divination des pratiques édictées par un gourou, infériorisation, domination des adeptes à qui on impose d’acheter des produits exclusifs ou des matériels ( "dynamiseurs" ) incontournables qui génère une dépendance, une soumission qui se prolonge souvent par la confiscation de la commercialisation du produit fini obligé d’intégrer des filières labellisées.
La biodynamie est à la culture biologique ce que l'homéopathie (et tout ce qu'elle véhicule comme absurdités : mémoire de l’eau et dilution) est à la médecine "intelligente» (prise en charge de l'être vivant partie intégrante de son environnement) ou ce que le vaudou est à la philosophie libertaire, l'escroquerie en sus. Il est inadmissible que vous cautionniez cet amalgame systématique qui montre en tout cas que, si la culture biologique est une libération individuelle, la "biodynamie" est un enfermement pyramidal flanqué de ses matons rompus à un lobbying capable d'intoxiquer (d’enivrer) une journaliste non avertie.

L'article complet d Monde Magazine ICI


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