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lundi 5 septembre 2016

Merci à VAUCLUSE MATIN de nous avoir donné l'autorisation de reproduire un article sur l'école initiée par les éditeurs d'ACTES SUD et dont le directeur pédagogique est dirigeant de la Fédération des Ecoles STEINER

À Arles, Actes Sud, l’éditeur qui a raflé le Nobel et le Goncourt en 2015, a créé “L’école du domaine du possible”. Les élèves ne sont pas notés et n’ont pas de manuels.

L’éditeur Actes Sud a une définition bien à lui de l’école. C’est un lieu qui doit permettre à l’élève de «devenir un être épanoui, créatif, autonome, libre et responsable, ayant acquis la confiance en soi et en l’autre, pour agir dans un monde où il aura envie de vivre». Et depuis la dernière rentrée de septembre, cette école, où on apprend aussi le bonheur, existe. Elle se trouve dans la chapelle du Méjan, un ancien temple romain, au cœur même du fief arlésien d’Actes Sud. Au bout d’un dédale d’escaliers, de coins et de recoins où la boussole est indispensable pour trouver son chemin. Un chemin de culture, jalonnés de milliers de livres dont on se demande si au fond ce ne sont pas eux les véritables maîtres des lieux. Autour de ces empilements d’ouvrages, des gens s’affairent, comme à leur service.
Cette école, Françoise Nyssen et son mari Jean-Paul Capitani, qui dirigent Actes Sud, l’ont créée après en avoir rêvée. Ici ni notes ni manuels scolaires, mais un projet pédagogique basé sur les apprentissages. Ceux de la citoyenneté, de la vie en groupe, du respect, du dialogue, du jardinage, de l’équitation, de la musique, de la littérature, et même du tricotage, une activité qui serait bénéfique à l’agilité mentale.

31 élèves de 8 à 14 ans répartis en deux classes

Évidemment, Henri Dahan, le directeur pédagogique, et les enseignants ne font pas l’impasse sur ce qu’ils appellent les "disciplines académiques” (maths, sciences, histoire, français...). Mais avec leur façon de faire. Par périodes et par projets. Exemple : trois semaines de cours de géométrie deux heures par jour avec le même prof, puis pareil pour l’histoire, l’anglais, l’allemand... et ainsi de suite. Mais tous les ajustements sont possibles, s’ils sont fondés, car rien n’est figé dans ce qui pourrait s’apparenter à un corpus gravé dans la pierre.
Ce lieu, baptisé “L’école du domaine du possible”, accueille 31 élèves âgés de 8 à 14 ans. Scindés en deux classes, une primaire et une secondaire, ils ont cours de 8 h 30 à 18 heures et déjeunent sur place. Des produits locaux et du bio. Chaque jour, ils vont aussi dorloter un jardin potager et monter à cheval. Avec les animaux, les enfants évoluent dans une sphère de l’intime qui privilégie la “relation” à la “compréhension”. Pour filer une métaphore qui ne devrait pas déplaire à ses patrons, Henri Dahan explique: « Les enfants sont les auteurs, et on doit les éditer. » C’est-à-dire les rendre heureux dans cette école, les extraire de la pression obsédante de la compétition entre élèves, leur donner les moyens de se réaliser à leur rythme... « Il faut les intéresser et leur donner du désir » précise Jean-Paul Capitani, pour qui l’école de la République est à bout de souffle puisqu’elle « fait souffrir les élèves et les enseignants ».
Dans la chapelle, qui donne sur une vaste terrasse qui sert de cours de récré, le mobilier est en bois clair, des instruments de musique et des chevalets sont posés le long d’un mur, des livres sont à disposition, et les enfants ont l’air détendu. Certains sont même joyeux quand vient le moment d’apprendre le complément d’objet direct à la faveur de l’exemple du poisson que pêche le pêcheur, ou celui de chanter et de jouer d’un instrument. Ils le sont aussi quand des auteurs maison vont à leur rencontre, comme notamment l’Ardéchois Pierre Rabhi.
Françoise Nyssen qui, à l’instar de son époux, explique que « les neurosciences montrent que l’apprentissage ne peut pas se faire dans le matraquage et le redoublement mais dans le désir », est déjà heureuse du bout de chemin parcouru en un seul trimestre. Parce que le courant passe entre l’équipe pédagogique et les élèves, et que les sons de cloche qui lui reviennent de cette singulière chapelle dédiée aux apprentissages sont positifs.
Même d’ailleurs du côté du recteur de l’académie d’Aix-Marseille qui, selon Henri Dahan, voit “L’école du domaine du possible” comme « un laboratoire pédagogique ». Mais si ce “laboratoire pédagogique” a un coût pour les familles, entre 2000 et 6000 euros par an selon leurs revenus, un fonds de dotation parraine les moins fortunées. Car tous les enfants sont ici les bienvenus.
Par Patrice PALAU

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