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lundi 24 mai 2021

Les mouvances que nous avons déjà évoquées , qui dénoncent la "dictature sanitaire" et la vaccination démenties par la Cour européenne des droits de l'Homme


 

 

 

L’an dernier, nous avions déjà présenté une décision de la commission européenne des droits de l’homme (une institution qui n’existe plus en tant que telle). La commission avait estimé, à propos d’un litige entre des citoyens de l’État de Saint-Marin et le gouvernement, que l’obligation de se faire vacciner relevait d’un impératif de santé publique et qui n’était pas excessive. Avaient été mis en balance d’une part la liberté de chacun de disposer de son corps, d’autres part l’intérêt de la collectivité.

La  Cour européenne vient de confirmer cette jurisprudence. L’arrêt a été pris récemment, mais à propos d’une affaire survenue avant la pandémie actuelle.
 
Il est extrêmement long. Aussi nous vous soumettons d’une part le communiqué du greffier de la Cour, qui en a fait un résumé significatif,  d’autres part l’analyse qu’on fait Madame Roseline Letteron, dans son blog que nous vous recommandons , comme nous recommandons la lecture de son manuel de libertés publiques, une matière qui constitue la colonne vertébrale de l’action de notre association. 
 

 
Des mouvements, parfois liés à l’extrême droite catholique intégriste ou des personnalités, à titre individuel, issus de mouvances que nous appellerons pseudos écologistes ont dénoncé la « dictature sanitaire » ou encore comparé certaines directives au couvre-feu imposé par l’Allemagne nazie. La Cour européenne vient de leur infliger un démenti.

 

vendredi 14 mai 2021

Dérives sectaires : le code de l’urbanisme n’est pas forcément l’outil approprié. cliquer sur les images pour agrandir)



De contentieux récents ont été médiatisés :
Le premier concerne  une école que projette de l’association turque Milli Gorus (celle qui projette l’édification d’une importante mosquée à Strasbourg et dont un projet semble-t-il avorté de subventionnement public a fait l' objet d’une polémique) .
Le second est relatif à la construction d'un lieu de culte pour la Fraternité Saint Pie X.

Dans les deux cas, les élus avaient tenté de s’opposer au projet pour des raisons d’urbanisme, mais dans les deux cas,  la justice administrative a répondu à des objections liées au code de l’urbanisme par des raisons exclusivement liées à ce type de contentieux. Il arrive que des raisons d’urbanisme permettent  effectivement de s'opposer à l'édification d'un bâtiment, mais aucun permis de construire ne peut être refusé en raison de la personnalité du requérant. Et ceci n’est pas valable uniquement dans le domaine qui nous intéresse.
 
Pour éclairer nos lecteurs, nous donnons de larges extraits des décisions judiciaires originales.
 


 

 

mardi 4 mai 2021

ANNE -MARIE FRANCHI, un parcours de militante de la laïcité


 

 

Anne Marie Franchi, que nous avons connue lorsqu’elle était vice-présidente déléguée de la Ligue de l’enseignement,  a livré sur cette vidéo le témoignage de son parcours de militante laïque, d’abord à la FCPE en tant que parents d’élève, puis aux délégués départementaux de l’éducation nationale dont elle fut secrétaire générale, puis enfin à la ligue de l’enseignement .
 
Elie mentionne à plusieurs reprises la nécessité de prévenir l’emprise sectaire, un élément indissociable pour elle (comme pour nous) du combat laïque.Certains d'entre nous sont encore en contact amical avec elle. Elle a rejoint notre association des sa création en 2002, nous sommes fiers d’avoir pu la compter parmi nos adhérents.


Conseil de lecture: De la laïcité en France .Patrick Weil (ed Grasset)

 



Un livre très bien documenté sur l'histoire de la loi de 1905,sur le travail remarquable d'Aristide Briand ,secondé par Louis Méjan:

"Huit années pour concevoir,puis exécuter une politique de la laïcité qui est toujours celle de la France".

Un essai rigoureux et pédagogique, bienvenu en ces périodes troublées où l'on fait tant de contresens sur la laïcité ,et où les polémiques se multiplient. Patrick Weil nous rappelle que "la laïcité,c'est d'abord du droit.On peut la penser en tant que philosophe,historien,sociologue.Mais lorsque la loi, et particulièrement la loi pénale s'en saisit, c'est autour de son texte et desa jurisprudence que doivent s'organiser l'étude et l'effort de compréhension".

La loi de 1905 est d'actualité.Patrick Weil nous renvoie aux articles

31,34,35 ,qui prévoient des dispositions pour lutter contre les dérives possibles de toute religion .

Ces articles associent l'affirmation de droits fondamentaux (la liberté absolue de conscience,la neutralité de l'Etat, la liberté de culte),à des dispositions pénales chargées de les protéger .

Patrick Weil évoque des cas précis dans l'histoire et de nos jours,en France,et (même si cela peut paraître étonnant)le droit aux USA .

Ce livre apporte des réponses,et nous dit "La loi de 1905,mais toute la loi".


Le groupe de sociologie des religions et de la laïcité: Prévention du sectarisme vs défense des libertés?

 

 


 

 

Pendant longtemps, et notamment au sein du groupe des sociologues de la religion et de la laïcité, (GSRL), rattaché au CNRS, le professeur Baubérot à pourfendu nos associations. Nous en donnons  ici un exemple, tiré d’un texte tiré de son ancien blog et intitulé « l’attristante bêtise d’une commission parlementaire ».

Nous ne pouvons que regretter la discourtoisie des termes, mais nous lui promettons, autant à lui-même qu’à celles et ceux qui partagent ses idées, que nous nous permettrons jamais , au cercle laïque pour la prévention du sectarisme, de disqualifier  qui que ce soit. Nous discuterons toujours les idées sereinement, comme nous pensons l’avoir toujours fait.

Peut-être n’y sommes-nous pas toujours arrivés, mais du moins la courtoisie dans le dialogue a toujours été notre objectif, c’est pour nous consubstantiel à la laïcité.

Il a dirigé la thèse  de Madame Valentines ZUBER . Il a ici aussi écrit un livre en collaboration avec elle.

Précisons que nous avons lu certains de ses ouvrages,  nous n’avons pu qu'apprécier -et combien- « la morale laïque contre l’ordre moral », une compilation des cahiers d’écoliers permettant de dégager les valeurs de l’école républicaine récemment créée.

Pour en revenir à Madame ZUBER , elle semble défendre intactes les idées de son directeur de thèse, en témoigne cette citation extraite d’une récente conférence devant une université canadienne. (18ème minute)


Je dirais que le projet de loi actuel, confortant les principes républicains, ne déroge pas à cet a priori anti religieux même si évidemment il a changé de cible, en passant de la lutte contre le catholicisme clérical à la lutte contre l’islam et d’ailleurs accessoirement, on en parle rarement, mais cela reste en toile de fond,  contre toutes les expressions religieuses minoritaires jugées a priori suspectes et on voit resurgir quelques antiennes contre les sectes à travers la réactivation par exemple de la Miviludes,  organisme interministériel de vigilance et de lutte contre les sectes. La parution de son dernier rapport montre d’ailleurs que les démons de la lutte contre les religions existent toujours ;  par exemple quand on parle de prosélytisme exagéré de certains groupes de Témoins de Jéhovah on outrepasse largement le principe de laïcité de l’État. 


Répondons sur les arguments : nous avons pensons-nous été actifs dans la défense de la mission interministérielle.  Nous comptons parmi nos adhérents et sympathisants, non seulement des personnes de toutes obédiences, mais également des gens d’église. Le problème  n’est pas la croyance, mais la conformité des pratiques à la dignité humaine et aux droits de l’homme telle qu’ils ont été énoncés par les rédacteurs de la Convention européenne.

Certes il nous est déjà arrivé de discuter des croyances. Lorsque le mouvement raélien suisse s’est vu refuser une campagne  d’affichage sur les panneaux appartenant à la commune de Neuchâtel en Suisse, la promotion de la géniocratie, du clonage humain, et de  pratiques sexuelles entre adultes et mineurs nous ont fait considérer que la doctrine raélienne était en elle-même une atteinte à la dignité. À une très courte majorité il est vrai, les juges de Strasbourg  en ont décidé ainsi.

En revanche, nous ne reprochons pas aux témoins de Jéhovah leur prosélytisme, après tout, si tout prosélytisme était interdit, nous vivrions dans une société aseptisée où tout débat serait proscrit.

En revanche, la justice belge a récemment, nous nous en ce sens nous nous sommes fait l’écho, condamné  les témoins de Jéhovah pour discrimination. Nous avions relevé en ce qui nous concerne qu’il était conseillé par une revue jéhoviste aux parents dont les enfants se détachaient de la foi  qu’ils leur avaient inculquée de rompre à leur majorité.

Nous avions estimé que cette injonction était d’une entorse à la vie privée et familiale au sens de l’article huit de la Convention. Le tribunal de Gand, en première instance, en a jugé ainsi, si un appel a été interjeté , nous ne saurions être certains que cette jurisprudence serait maintenue.

Nous nous référons également à des conclusions de la commissaire du gouvernement  devant la cour administrative d’appel de Paris, lorsque des témoins de Jéhovah, sauvés par une transfusion, avaient poursuivi en justice … l’établissement hospitalier qui leur avait sauvé la vie en invoquant l’article neuf de la Convention (liberté de conscience et de religion). Nous citons des extraits de ces conclusions, une citation peut-être un peu longue mais destinée à bien montrer que ce n’est pas une opposition primaire à la religion qui nous mène à discuter les méthodes sectaires, mais qu’au contraire nous pouvons nous aussi faire preuve de réflexion dans les domaines de l’éthique et du droit. Ce qui n’est pas à notre sens une propagande antireligieuse primaire.


« Dans cette conception, la notion de dignité n’est pas synonyme de liberté absolue (autonorma). Elle comporte une dimension objective, qui se fonde sur l’appartenance de l’individu à l’humanité, qui amène à faire prévaloir, quand est en cause une valeur propre à la condition humaine, l’universel sur les préférences singulières. »(...)« La dignité de la personne, principe absolu s’il en est, ne saurait s’accommoder des conceptions subjectives que chacun peut en avoir, même l’intéressé. »(...) « Pour en revenir au présent litige, y-a-t-il eu manquement aux obligations légales du praticien hospitalier ? La nécessaire conciliation entre respect de la volonté du malade et finalité thérapeutique de l’activité médicale s’opère souvent sans difficulté insurmontable quand la relation peut s’inscrire dans la durée et en l’absence d’urgence vitale. Mais dans les cas extrêmes, il est inéluctable de faire prévaloir une exigence légale sur l’autre. Or, en l’espèce, d’une part nous sommes bien dans un cas limite et d’autre part les devoirs du médecin ne se limitent pas au respect de la volonté individuelle. »(...) « Si la thérapeutique appliquée à la requérante a pu, eu égard à la qualité de Témoin de Jéhovah de l’intéressée, constituer une atteinte à la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, cette circonstance n’est nullement constitutive d’une violation de cette disposition, dès lors qu’elle résulte, ainsi qu’il a été dit ci-dessus, du respect par le médecin de l’obligation de protection de la santé et donc, en dernier ressort, de la vie qui s’impose à lui. »(...)«La représentation française de l’autonomie a un sens (…), inspiré du droit romain mais aussi de Rousseau et de Kant : c’est la capacité de poser et de respecter des devoirs universels, des lois, envers les autres et envers soi-même comme membre de l’humanité. Un être autonome ne peut vouloir rationnellement un comportement qui n’est pas universalisable. Dans cette conception, le gréviste de la faim, celui qui refuse un soin vital, n’est pas autonome, ce qui justifie l’intervention de l’Etat ou du médecin. (…). C’est ainsi que l’on explique la jurisprudence du Conseil d’Etat relative à la nécessité du consentement à l’acte médical qui ne consacre pas cette exigence comme un absolu."


Nous n’ignorons pas que des juristes ou des sociologues peuvent ne pas penser comme nous, ils en ont parfaitement le droit, mais nous regrettons que des arguments  nous disqualifiant d’emblée soient utilisés : nous ne sommes pas anti religieux, et nous ne pensons pas être plus durs que purs comme l’affirmait M. Baubérot. Nous réfléchissons sur les droits de l’Homme -où est le mal ?-nous poursuivrons nos recherches mais en refusant toute discourtoisie.



lundi 19 avril 2021

Les Témoins de Jéhovah condamnés en première instance pour discrimination par le Tribunal de Gand; UNIA, l'ancien CENTRE POUR L'EGALITE DES CHANCES ET LA LUTTE CONTRE LE RACISME était partie civile



Lors d’un récent billet, nous avons évoqué une procédure judiciaire en Belgique à l’encontre de l’organisation des témoins de Jéhovah. Le tribunal de Gand a rendu son jugement.

Rappelons que nous avions évoqué deux postures . La première implique que l’État doit simplement s’abstenir de toute ingérence dans les droits des personnes physiques et morales placées sous sa juridiction. En d’autres termes ne se préoccuper en rien des pratiques des organisations religieuses qui échapperaient à sa compétence et n’exercer aucun contrôle en ce domaine. A l’inverse la seconde posture impose aux pouvoirs publics de veiller à ce que  des violations des droits de l’homme n’interviennent pas entre personnes privées, physiques ou morales ; donc ici de s’assurer que les pratiques d’un groupe, quelle que soit sa nature ne soient pas constitutives de telles violations à l’encontre tant de leurs membres que des personnes qui décideraient de s’en éloigner.

Nous avons indiqué que nous nous rallions à cette seconde position, plus exigeante en matière de respect des droits de l’homme.

Le tribunal de Gand à également adopté cette posture en condamnant l’organisation des TJ au profit des parties civiles, auquel s’était joint UNIA, auparavant nommé centre pour  l’égalité des chances et la lutte contre le racisme. Ce jugement a été publié sur le site de cet organisme officiel, nos lecteurs peuvent le retrouver : il comporte pas moins de 52 pages   … en langue néerlandaise. Nous avons vérifié auprès dudit organisme qu’il n’en existait aucune version dans notre langue, et nous sommes résolus à utiliser un traducteur payant en ligne. Nous n’allons pas reproduire la totalité de ce document (1h30 de lecture si on ne lit pas superficiellement).

Aussi allons-nous le résumer en introduisant des liens vers des extraits significatifs . Les chiffres de renvoi mènent à un document dont voici le lien et qui fournit des extraits plus longs et plus détaillés.

Bien évidemment, l’organisation des témoins de Jéhovah nie à l’État toute légitimité pour porter la moindre appréciation sur ses pratiques internes. Ce au nom des dispositions pertinentes de la Convention européenne des droits de l’homme . « Le devoir de neutralité et d'impartialité de l'Etat en matière religieuse La défenderesse fait valoir dans ses conclusions que si le tribunal devait déclarer les charges prouvées, cela constituerait une violation du devoir de neutralité et d'impartialité de l'Etat et des articles 9, 10 et 11 de la Convention européenne des droits de l'homme. Article 9 CEDH (droit à la liberté de religion) (…) La défenderesse fait également valoir dans ses décisions que les poursuites et les accusations portées contre elle sont en violation de l'article 10 de la CEDH et que le tribunal devrait adopter une attitude neutre et impartiale au regard de ces droits garantis également. Le droit à la liberté d'expression est un droit universel dont le respect doit être étroitement surveillé.(…) (1) L'usage religieux de l'exclusion est un usage interne à l'église sur lequel les tribunaux n'ont aucune juridiction (2) »

Mais la justice belge a donné satisfaction aux parties civiles.  Nous avons signalé que les prescriptions nous semblaient très dures : par exemple, « elle et sa famille sont privés de toute forme de respect de dignité humaine à cause des témoins de Jéhovah et de sa propre  famille (…) En raison de la politique d’exclusion, leurs enfants ont également été privé de contacts normaux avec leurs grands-parents » (…) L'ensemble de ces déclarations montre qu'après l'exclusion (quelle qu'en soit la raison, y compris l'éloignement des réunions, un nouveau partenaire qui n'est pas Témoin, une nouvelle conviction religieuse, une dépendance à l'alcool, etc.), les personnes dénoncent surtout le fait d'être évincées par les membres de la famille et les amis et d'être exclues des célébrations (familiales) ».(3)

Il est également question de pressions : «… Les témoins de Jéhovah essayent de les convaincre sous pression de redevenir membres des témoins. Certains d’entre vous ont peur de quitter l’organisation par craindre de perdre leurs familles et leurs amis et/ ou leurs conjoints et/ ou d’être ignorés par leurs connaissances». (3)

Autre type de pression : « un croyant qui entrent en contact avec une personne exclue ou retirée lui-même exclu. Une personne peut être exclue pour chacun car n’en autorisé. Par exemple, je connais une famille qui a rejeté son fils parce qu’il était gay ». Ou encore : « cette politique d’exclusion est donc fondée que sur une croyance différente il sert intimidation pour vous forcer à revenir ». 

 Le juge d’Outre Quiévrain se réfère donc à la loi belge contre les discriminations de 2007 , aux articles pertinents de la Convention européenne des droits de l’homme, qui n’érige pas les libertés de conscience, d’expression, et d’association en absolus, mais  apporte des limitations liées notamment aux droits et libertés d’autrui et aux nécessités d’une société démocratique , à la protection de la morale et de la santé publique, etc... Il en déduit que la liberté d’expression peut être soumise à des limitations si les idées émises appellent à la la discrimination .

Le tribunal invoque même la notion de harcèlement, qui porte atteinte à la dignité de la personne.  « La notion de harcèlement telle que visée à l'article 21 est expliquée à l'article 4, 10° de la loi anti-discrimination, plus précisément : " un comportement non désiré lié à l'un des critères protégés qui a pour objet de porter atteinte à la dignité d'une personne et de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ".(4)

Et de conclure que l’isolement social des exclus est une atteinte à la liberté de croyance et surtout à celle d’en changer, garantie par l’article 9 de la Convention européenne et par la constitution belge. 

Il note également que les articles 10 et 11 de la Convention relative aux libertés d’expression et de réunion ne sont pas un absolu .  En l’occurrence, il y a un conflit de droits, car, poussé à l’extrême, dans ce cas d’espèce, l’absence de limitations à l’exercice de ces droits mènerait à une violation de la « vie privée et familiale », un terme qui reprend l’article 8 de la Convention européenne.  « En ce qui concerne les faits qui lui sont reprochés, la défenderesse ne peut pas non plus se prévaloir de la liberté d'expression et de réunion (articles 10 et 11 de la CEDH), car ces libertés ne sont pas absolues et sont limitées par les libertés constitutionnelles et les libertés garanties par la CEDH à l'égard des citoyens et par le droit pénal, en l'occurrence la loi anti-discrimination. En particulier, par la manière dont la partie défenderesse propage la politique d'exclusion et l'enseigne aux communautés religieuses locales, une restriction inadmissible est commise au droit au respect de la vie privée, familiale et de famille des (anciens) membres des Témoins de Jéhovah, tel que garanti par l'article 8 de la CEDH et l'article 22 de la Constitution ».

«La défenderesse utilise un mécanisme de contrôle social pour imposer la conformité au sein de son groupe. La critique n’est pas tolérée et sanctionnée par l’exclusion de la communauté religieuse. En dissimulant cette intention criminelle sous le couvert des droits garantie de la liberté de religion et d’autres droits qu’elle a cité, la prévenu viole elle-même de manière flagrante le droit au respect de la vie privée, familiale et de la famille garantie par la CEDH (article huit CEDH), la liberté de religion et la liberté de changer de religion (article neuf), la liberté d’association ( article 11 de la CEDH) de la part de ceux qui ont été exclu ils se sont retirés de la communauté religieuse et l’interdiction de la discrimination (article 14 de la CEDH) »

Ou encore, autre citation : « l’incitation à la discrimination et à la perpétration de violences morales et de haine en raison d’une croyance différente ne peut être toléré en aucune circonstance dans notre société pluraliste. Le législateur a rendu ses comportements punissable par la loi. Il appartient donc aux pouvoirs judiciaires de mettre un terme aux actes commis par l’accusé.  La défenderesse doit prendre conscience qu'en tant que membre de notre société démocratique, elle doit à tout moment respecter ses valeurs fondamentales, qui sont également protégées par le droit pénal. Il est également du devoir du pouvoir judiciaire de veiller à ce que la liberté de religion et la liberté d'expression ne soient pas utilisées abusivement pour commettre des crimes et infliger des dommages moraux irréparables aux personnes. Dans notre État de droit, la primauté du droit s'applique. Les règles religieuses ne sont pas au-dessus de la loi dans notre société. Le tribunal espère que cette affaire pénale fera prendre conscience à la défenderesse de la gravité des infractions qu'elle a commises pendant de nombreuses années et que cette affaire pénale l'incitera à adapter sans délai sa politique d'exclusion afin qu'elle s'abstienne de commettre de nouvelles infractions à l'avenir. »

Nous ne savons pas à l’heure actuelle si ce jugement fera l’objet d’un appel. Nous ne disons pas qu’une nouvelle jurisprudence serait née. Nous avons fait part d’un débat juridique, nous avons assez clairement donné notre point de vue : les droits de l’homme s’imposent dans les rapports entre particuliers. Nous avons assez souvent dit et répété que nous n’agissons jamais par haine. Notre seule boussole, c’est les droits de l’homme tel que nous les concevons

Bien entendu, si un appel devait être interjeté , quelle que soit l’issue, nous en tiendrons nos lecteurs informés avec impartialité. Mais nous sommes d’ores et déjà satisfaits de constater que notre conception de l’ordre public est  partagée par des juridictions, fussent-elles étrangères. Et ce d’autant plus qu’elle serait aisément transposable en France, car notre pays, tout comme la Belgique, est partie prenante à la Convention européenne et soumise au contrôle de la Cour européenne des droits de l’homme . 

Si un contentieux de ce type devait échouer devant les Juges de ladite juridiction à Strasbourg , nous serions bien en peine d’en prévoir l’issue , tellement nous décelons de l’imprévisibilité dans sa jurisprudence.




Ici le lien vers l’article paru sur le site d’UNIA, partie civile dans la procédure.


G.KLEIN

cf les sectes et l'ordre public 2004 Presses universitaires de Franche-Comté





lundi 12 avril 2021

Retour sur une mascarade.

Nos lecteurs de ce 12 avril seront peut-être intrigués par ce titre. Souvenons-nous, c’était à l’automne 2020.

Le lundi 26 octobre 2020, ci-dessous, deux pages plus bas, nous nous étonnions de constater que dans les entours des supports médiatiques du mouvement Colibris, des enfants puissent être utilisés comme acteurs d’un clip appelant à jeter les masques anti-covid.

Voici pour nos lecteurs pressés ce lien en guise de raccourci sur notre propre blog :

Puis le mardi 3 novembre 2020, nous revenions étayer notre propos et tenter d’éclairer le contexte.

Ce jour-là nous nous proposions de revenir sur le sujet.

Ce « retour sur une mascarade » est donc notre promesse tenue.

Ce clip « la mascarade » est une production d’un collectif de parents de la région lyonnaise, insérée sur la plate-forme collaborative  « colibri-wiki ».

Vous le trouverez toujours en ligne ici :

Nous avons insisté sur le fait que rien ne nous permet d’affirmer que le mouvement Colibris en tant que tel soit clairement impliqué dans cette action, même si cette publication figure sur un de ses supports…

Nous ne regrettons pas notre prudence : toutes les pages de ce dossier comportent désormais le bandeau suivant :

 


DONT ACTE.

Sommes- nous par nos billets qui ont été très lus, peu ou prou à l'origine de cette mise au point?

Nous n'en savons certes rien.

Toutefois, ledit dossier est bel et bien toujours hébergé sur la plate-forme collaborative du mouvement Colibris.

Nous avions quand même considéré que la mouvance des Colibris manifestait une certaine porosité, une certaine complaisance peut-être, à l’égard du courant de résistance aux mesures sanitaires.

Deux groupes locaux de Colibris avaient relayé le clip en l'approuvant chaudement.

Nous ne pouvons que confirmer les raisons de notre vigilance: il nous a été donné d’examiner la page Facebook du groupe Colibris de Montpellier et ses alentours. 

En date du 17 mars dernier, un post Facebook montre une foule de personnes, certaines masquées, d’autres non, agglutinées.

Le titre : « nous on veut continuer à danser en corps... »

Nous ne savons pas qui a été à l'initiative de ce rassemblement. Seule certitude : le groupe local l'a relayé.

À la même date, une chorégraphie, sous le titre « la Corona », débute par les paroles suivantes : 

« C’est pas ce Covid qui maintenant va nous faire flipper ».

Et le 25 février, le groupe Colibris de la région de Montpellier un passage du collectif masques blancs, sur fond sonore de déclarations hostiles tant aux vaccins qu’à toutes précautions sanitaires.

Nous pouvons confirmer que le mouvement Colibris n’est pas engagé en tant que tel dans cette action. Toutefois, ces groupes locaux peuvent dévoiler leur sensibilité à cette action militante et leur souci de s'en faire les propagandistes.

Nous nous efforçons, comme toujours, de garder la juste mesure des choses et de viser à fournir des informations aussi exactes et nuancées que possible.

Et parce qu’elle nous semble encore une fois d’actualité, nous reprenons notre conclusion du 03 novembre : si formellement, ni l’association Colibris, ni la mouvance steinerienne en elle-même, ne peuvent être taxés de réticence militante aux directives des autorités sanitaires, il nous semble fondé de s’interroger sur l’existence possible d’une certaine porosité aux thèses anti-directives sanitaires.

Ainsi leur accueil sur une plateforme Colibris relève-t-il d’une très, très grande ouverture d’esprit ou d’une plasticité torsadée?

Nous restons encore une fois avec cette interrogation sans à-priori et invitons nos lecteurs à s’interroger avec nous.

Nous y reviendrons. Très probablement.








 

jeudi 8 avril 2021

LE POINT avec GEORGES FENECH

 

lundi 29 mars 2021

Questions d’éthique et questions de droit autour de la pratique du « shunning » : le cas des Témoins de Jéhovah.

Questions d’éthique et questions de droit autour de la pratique du « shunning » : le cas des Témoins de Jéhovah.

 

 


Le terme « shunning » désigne une injonction faite aux fidèles par les instances dirigeantes d’une religion de cesser toutes relations avec ceux qui remettent en question leurs croyances. La conséquence en est une rupture des liens familiaux et amicaux. Cette punition est un moyen de dissuasion.

Une récente actualité nous rappelle que cette pratique soulève des questions fondamentales.

Ainsi, que les Témoins de Jéhovah aient pu être discriminés dans l’histoire, nous ne chercherons pas à le nier, ni à y trouver une justification morale. Par exemple dans une période récente la Grèce fut condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme lorsque fut infligée une sanction pénale à un Témoin de Jéhovah dont le seul tort avait été de faire du porte-à-porte… au domicile d’un chantre orthodoxe. Que cela soit clair, l’action du CLPS est fondée sur le respect des droits de l’homme, dans tous les cas. Que par la suite nul ne nous fasse dire ce que nous n’avons jamais dit !

Des discriminations anciennes ou présentes ne justifient pas non plus que les témoins de Jéhovah se rendent eux-mêmes coupables de discrimination. Et c’est là un débat juridique récurrent en Belgique, dont nous avons pu saisir un certain nombre d’éléments et dont nous continuerons à vous tenir informés.

Dans La Tour de Garde du 15 janvier 2007, un article s’intitule: restez fort si votre enfant se rebelle.

Nous en avions connaissance depuis longtemps. Ses termes, disons le franchement, nous semblent plus que sévères, c’est ainsi que nous les ressentons :

« Si votre enfant ne se reprend pas, et qu’il soit un chrétien baptisé, il devra peut-être recevoir la forme la plus sévère de discipline : l’excommunication. Les contacts que vous pourrez alors avoir avec lui dépendront de son âge et d’autres circonstances. Naturellement, si l’enfant est mineur et qu’ils vivent chez vous, vous continuerez à pourvoir à ses besoins physiques (…). Il n’en va pas de même lorsque l’enfant excommunié est majeur il n’habite plus sous le toit familial (…). Même si certaines questions familiales peuvent vous obliger à avoir quelques contacts avec votre enfant excommunié, vous devriez vous efforcer d’éviter les rencontres qui ne sont pas indispensables ».

Nous avions connaissance de ces passages qui nous semblaient déjà d’une extrême dureté. Nous ignorions alors que ce point de doctrine des Témoins de Jéhovah serait la source d’un contentieux judiciaire outre Quiévrain.

En effet, un disciple ayant abjuré sa foi ancienne, pour devenir protestant, avait poursuivi les Témoins de Jéhovah pour discrimination. Son départ ayant selon lui, du fait de ce type de directive, éloigné de lui tant son entourage amical que sa propre famille.

Ils s’ensuivit un feuilleton judiciaire. Voici tout d’abord un extrait d’un arrêt de la Cour d’appel de Liège en date du 6 février 2006:

« Il ressort des divers documents soumis à l'appréciation de la Cour que des pressions morales sont exercées sur les autres adeptes dès lors qu'il leur est conseillé de supprimer non seulement les contacts spirituels — ce qui est compréhensible — mais aussi les rapports sociaux et familiaux qui doivent se limiter au minimum indispensable. Cette pression morale résulte essentiellement du fait que si un membre de la congrégation va au delà de ce minimum, il peut être exclu. Dans ces conditions, la liberté de culte elle-même risque de ne plus être respectée dans la mesure où, si les pressions sont trop fortes, l'adepte qui souhaite quitter la communauté s'en trouve moralement empêché, obligé qu'il est de choisir entre deux situations moralement dommageables : soit continuer à adhérer à des principes auxquels il ne croit plus et maintenir sa vie privée familiale et sociale, soit quitter la communauté et se voir rejeté par sa famille et ses connaissances. Dans cette mesure, les consignes données - quoiqu'en dise l'intimée, il ne s'agit pas de simples « réflexions » — risquent, in abstracto, de créer une discrimination. »

Mais l’intéressé n’obtint pas satisfaction... cependant le principe était posé par la Cour d’appel!

Pour des raisons de droit, l’arrêt fut cassé par la Cour de cassation belge. Et la même affaire fut traitée par la Cour d’appel de Mons. Le plaignant était soutenu par le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme, créé par une loi belge de 1993. Il fut débouté, nous donnons les raisons, qui nous semblent aller à l’encontre des attendus de l’arrêt de la Cour d’appel de Liège.

« Le fait qu’un mouvement religieux édicte à l’égard de ses membres et publie dans ses revues des règles de comportement à adopter vis-à-vis des anciens membres régulièrement exclus–la régularité de cette exclusion ne faisant pas ici débat, lesquels se limitent à éviter de les fréquenter, de leur parler voire de les saluer, ne permet pas de présumer l’existence d’une quelconque discrimination. Pour autant que les limites de la légalité ne soient pas franchies, toute personne est libre de suivre ou non les préceptes de la religion qu’il a choisie, en ce compris à l’égard des membres de sa propre famille. L’article 9 CEDH garantit le libre exercice du droit à la liberté de religion. L’obligation de neutralité et d’impartialité interdit à l’État de porter une appréciation sur la légitimité des croyances religieuses ou sur la façon dont elle se manifestent dans le cadre du principe de l’autonomie personnelle des croyants. »

Comme à l’accoutumée, afin de permettre à nos lecteurs de se documenter de manière approfondie et de ne pas déformer le sens d’une décision judiciaire en ne la citant que partiellement, nous leur donnons accès aux textes complets sur ce lien

Le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme changea de nom et devint Unia (service public indépendant qui lutte contre la discrimination, promeut l’égalité et protège les droits fondamentaux). Nous reproduisons un paragraphe de son rapport annuel 2019.

« La liberté de pensée, de conscience et de culte implique aussi que quelqu’un a le droit de ne pas (ou plus) avoir de conviction philosophique ou religieuse. En 2019, Unia a par exemple reçu de nouveaux signalements relatifs à la communauté religieuse des Témoins de Jéhovah. Le réseau social des Témoins de Jéhovah se limite souvent aux seuls membres de cette communauté. Lorsque des membres sont exclus ou veulent se retirer du groupe, ils se retrouvent dans un isolement social parce que cette communauté rompt tous les liens avec les anciens membres. Unia avait déjà déposé plainte auprès du parquet en 2015 à la suite du signalement d’un ancien Témoin de Jéhovah : selon Unia, la politique d’exclusion de cette communauté religieuse incite de manière répréhensible à la discrimination, à la haine ou à la violence. Le parquet a clôturé l’instruction en 2019 et Unia a été informé que le dossier serait transmis au juge pénal. »

Une nouvelle procédure était en cours. Elle vient de trouver un épilogue, provisoire s’il y a appel, avec un récent jugement du tribunal de Gand. Cette juridiction a donné satisfaction aux requérants dont l’action n’était pas prescrite, soit la grande majorité d’entre eux. Nous avons ci-dessus donné le lien vers l’article de presse qui annonce cette décision judiciaire.

Comme nous le faisons habituellement, nous attendrons d’avoir le texte intégral de la décision définitive, surtout si appel devait être interjeté. Nous ne ferons le point qu’à issue de la procédure.

Toutefois, nous pouvons déjà, à ce stade, et indépendamment des contentieux en cours ou à venir, dégager deux doctrines différentes, qui ont des incidences tant sur notre conception de la laïcité que sur celle des obligations pesant sur les Etats signataires de la Convention européenne des droits de l’homme.

Et les Témoins de Jéhovah ne sont pas les seuls à être concernés.

Selon la première conception, l’État doit rester neutre vis-à-vis des religions, (tout cela est valable pour des idéologies autre que religieuses), les laisser libres de s’organiser comme elles l’entendent, et donc ne pas intervenir  lors du contentieux qui pourrait opposer des disciples et/ou anciens disciples d’une confession entre eux. Le site human rights without frontiers cite Massimo Introvigne, du Centre d’études sur les nouveaux mouvements religieux (CESNUR) qui conclut ainsi un article : “En défendant les droits de leurs comités de discipline religieuse à se prémunir de toute ingérence de l’état quand ils décident de l’excommunication d’un membre ou d’autre chose, et leur droit à interpréter la Bible dans le sens où elle ordonnerait le rejet de ceux qui avaient été excommuniés, les témoins de Jéhovah défendent une fois de plus la liberté religieuse de tous, précisément dans un domaine où elle est actuellement particulièrement assiégée.” .”—The Journal of CESNUR,

La seconde conception résulterait notamment d’un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme. Lors d’un contentieux opposant l’État néerlandais à une jeune fille handicapée et à son père, les Pays-Bas furent condamnés. La jeune fille avait été abusée par le fils de la directrice de l’établissement qui l’hébergeait. L’État n’était pas directement responsable bien entendu de cet agissement, mais la Cour européenne avait estimé que les sanctions pénales prévues par  l’État membre n’étaient pas appropriées.

Les juges de Strasbourg ont élaboré une conception exigeante des droits de l’homme : le rôle des Etats n’est pas uniquement de s’abstenir de les enfreindre, mais de tout faire pour que les droits fondamentaux soient respectés dans les rapports entre particuliers.

Et c’est bien là le nœud  de cette divergence d’appréciation entre juridictions d’un même pays.  Dans le cas présent, soit l’État belge doit se borner à respecter la liberté de culte des Témoins de Jéhovah, les laisser s’organiser comme ils l’entendent, et bien entendu ne pas les discriminer (nous récusons les atteintes aux libertés et les discriminations!), soit il est tenu également de veiller à ce que les disciples ne deviennent pas eux-mêmes auteurs d’une quelconque violation des droits fondamentaux à l’égard de quiconque. Dans le cas présent cette atteinte serait une discrimination à l’encontre  de celles et ceux qui se tourneraient vers une autre conviction. 

Sans doute la liberté de chacun de fréquenter qui il veut doit-elle être respectée. Mais ériger en principe, en impératif, un ostracisme, et surtout  interdire en conséquence les relations intrafamiliales, notamment entre parents et enfants nous semblerait une  atteinte à la vie privée et familiale au sens de la Convention européenne (article 8), sur laquelle viendrait se greffer une discrimination (article 14).

Que ce soit encore clair, nous ne mettons pas en cause en tant que telle la doctrine des Témoins  de Jéhovah, qui reste protégée par la même Convention européenne des droits de l’homme. Nous récusons avec force tout ce qui pourrait s’apparenter à la haine. Nous faisons seulement nôtre une conception exigeante de la défense des droits de l’homme, qui vise à une régulation des rapports entre individus respectueuse de la dignité de chacun.