Nous avons maintes fois traité le dilemme auquel sont confrontés les établissements hospitaliers et l'administration lorsque le pronostic vital est engagé si un témoin de Jéhovah refuse une transfusion indispensable à sa survie. Pour le CLPS, nous avons déjà affirmé, tant juridiquement que moralement, c'est la vie qui prime.
Nous avons retrouvé le rapport d'un « coroner » sur le décès de Madame Éloïse Dupuis en 2016 au Québec. Nous vous soumettons ci-dessous un extrait de son rapport et en pièce jointe le document dans sa totalité. Ce n'est certes pas notre conviction, mais nous estimons de notre devoir de donner une information aussi complète que possible. Avant la lecture du rapport lui-même, nous vous soumettons l'explication de ce qu'est un coroner.
Chaque religion a des règles de vie et de conduite, que ce soit, entre autres, le jeûne pendant certaines journées ou à certains moments de la journée, l’interdiction d’alcool ou de drogue, de contraception ou d’avortement. Ces règles de vie qu’adopte une personne en accord avec sa foi, quelles qu’en soient les conséquences, ne rendent pas son consentement moins libre. Si la personne est majeure et saine d’esprit, il s’agit d’un choix personnel que respecteront les tribunaux.
Ceux-ci n’ont jamais reconnu que la contrainte psychologique causée par l’appartenance volontaire à une communauté religieuse par une personne majeure et saine d’esprit soit un motif d’intervention. Ils interviendront cependant dans le cas des mineurs nécessitant des soins médicaux lorsque leurs parents refusent des traitements médicaux importants pour des motifs religieux.
Le consentement est « éclairé » lorsqu’il est donné en pleine connaissance de cause. Il a été établi depuis longtemps que, pour accepter ou refuser un traitement médical, la personne doit être parfaitement informée par le professionnel de la santé des avantages et inconvénients qui vont résulter de son accord ou de son refus de traitement.
Ainsi, la loi donne le libre choix à une personne majeure, saine d’esprit, consciente et bien renseignée d’accepter ou de refuser un traitement médical. Il s’agit d’une liberté fondamentale pour toute personne et il n’y a pas de recours juridique si cette personne exerce son choix en pleine connaissance de cause.
L’essence même de ce principe juridique est réitérée dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux (...) :
8. Tout usager des services de santé et des services sociaux a le droit d’être informé sur son état de santé et de bien-être, de manière à connaître, dans la mesure du possible, les différentes options qui s’offrent à lui ainsi que les risques et les conséquences généralement associés à chacune de ces options avant de consentir à des soins le concernant.
(...)
8. Nul ne peut être soumis sans son consentement à des soins, quelle qu’en soit la nature, qu’il s’agisse d’examens, de prélèvements, de traitement ou de toute autre intervention.
Le consentement aux soins ou l’autorisation de les prodiguer est donné ou refusé par l’usager ou, le cas échéant, son représentant ou le tribunal, dans les circonstances et de la manière prévue aux articles 10 et suivant du Code civil.
Le second principe juridique important est contenu dans la Charte des droits et libertés de la personne (RLRQ, chapitre C-12) :
3. Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté deconscience, la liberté de religion, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association.
En vertu de cette disposition, chacun a droit à la liberté de conscience et de religion. Tout citoyen a droit de pratiquer la religion de son choix, sans que l’état ne puisse intervenir dans ce choix personnel à l’exception d’une situation exceptionnelle où l’ordre public serait mis en cause.
Mis ensemble, ces deux principes juridiques fondamentaux font en sorte qu’une personne majeure, saine d’esprit, consciente et bien renseignée peut refuser un traitement médical pour une raison de conscience personnelle fondée sur ses croyances religieuses.
Le personnel médical ne pourra en aucune façon agir à l’encontre des volontés de cette personne même si la conséquence ultime pourrait être son décès.
Un médecin qui agirait à l’encontre de telles directives se retrouverait devant le Collège des médecins du Québec et risquerait des conséquences déontologiques pouvant aller jusqu’à la radiation pour avoir contrevenu aux directives claires et précises d’un patient. De plus, il engagerait sa responsabilité civile avec toutes les conséquences que cela comporte.
En effet, le code de déontologie des médecins du Québec reprend de façon explicite les articles du Code civil du Québec et de la Loi sur les services de santé et les services sociaux.
En certaines circonstances, comme celles au présent dossier, les médecins et tout le personnel médical se retrouvent devant une situation intenable. D’un côté, ils ont fait le serment de protéger et sauver la vie humaine et, de l’autre côté, ils ont l’obligation de respecter le libre choix de leur patiente même s’ils savent qu’ultimement, elle décèdera de son choix alors qu’un traitement médical simple pourrait éviter ce décès.
Je n’ai pas à commenter ou juger la présente situation et le choix personnel de Mme Dupuis et sa famille de refuser des produits sanguins. Je n’ai pas non plus à partager mon opinion personnelle sur ce choix. Mon rôle défini par la loi est de constater une situation et l’exposer simplement et clairement.
LE LIEN VERS LE RAPPORT INTEGRAL ICI
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