Dans
l'urgence, nous avons rédigé et "épinglé" sur nos
supports de
communication un billet destiné à exprimer notre incompréhension
devant le rôle dévolu à Tom Cruise,
scientologue
notoire, lors de la cérémonie de clôture des Jeux
olympiques de Paris. Nous avons également attiré l'attention de
nos lecteurs et mis à leur disposition le
lien vers le communiqué de la mission interministérielle de
vigilance et de lutte contre les dérives sectaires. Cet organisme
gouvernemental mettait en garde le public contre les distributions de
livrets d'une
association liée à l'église de scientologie : Non à la drogue, Oui
à la vie.
Notre
souci a toujours été de privilégier la réflexion et l'explication
en cédant le moins possible à l'émotion. Aussi, nous semble-t-il
utile, au-delà
de l'urgence, de rappeler le passé de ce groupe en matière de lutte
contre les toxicomanies. Bon nombre de groupes que nous étudions se
targuent de guérir les addictions. Naguère, le Patriarche, ainsi que
Narconon, une
filiale scientologue, ainsi que
des associations liées à des groupes évangéliques, se
présentaient comme des alternatives au traitement des addictions.
À
la fin du siècle précédent s'étaient créées des communautés
thérapeutiques. La relation soignant-soigné y est estompée au profit de l'aide mutuelle que
peuvent s'apporter malades guéris et en cours de guérison. Ceci
peut expliquer l'absence de personnel médical, là où ce serait nécessaire. Dans les années 80, il existait une communauté
thérapeutique en Côte-d'Or, gérée par l'association Narconon.
Une patiente ayant été victime d'une crise d'épilepsie, elle ne
put bénéficier d'un traitement adéquat, d'où son décès. Le 9
janvier 1987, le directeur adjoint du centre fut
condamné par le tribunal de grande
instance de Dijon.
Citation du jugement :
"
Que si Jocelyne Dorfmann avait pris la décision de réduire sa
consommation médicamenteuse, puis de l'interrompre au risque de
compromettre son état de santé, les prévenus ne l'ont à aucun
moment prévenue de la nécessité d'un examen médical d'admission,
lequel aurait vraisemblablement permis de contre-indiquer la cure de
sevrage ; qu'il est inconcevable que la victime ait pu être acceptée
sans cet examen et sans entretien sérieux malgré ses déclarations
sur son état de santé et son épilepsie, alors que les prévenus
ont reconnu savoir qu'en cas de maladie grave, le traitement médical
ne devait pas souffrir d'interruption ;(...) " Que si lors de la
survenue de la première crise, les prévenus ont pu se méprendre
sur la nature exacte, la répétition des crises et leur intensité
croissante devaient leur évoquer une origine distincte d'un état de
manque qui, selon les médecins experts, ne peut être confondu avec
un état épileptique ;(…) " Qu'ils n'ont pas jugé utile de
demander directement à la victime, alors qu'elle était encore
consciente, si ces manifestations pouvaient correspondre aux crises
d'épilepsie auxquelles elle avait fait allusion ou de faire appel au
médecin le plus proche. (...) "
Le
docteur Tomkiewicz,
spécialiste en la matière, avait alors rédigé une étude qui ne
fut pas publiée de son vivant, mais dont le contenu nous a été
révélé lors de la publication d'une thèse
juridique. L’auteur
ne nomme ni ne précise le lieu où est
implanté le centre dont il expose le
fonctionnement, mais il le
présente clairement comme une émanation de l'Église de
scientologie. Voici quelques extraits : "Drogue-Stop
nous apparaît comme la caricature du terrain d'essai d'une
idéologie. Les individus les plus fragiles, sans repères solides,
angoissés pour leur vie présente et leur avenir, donc les plus
malléables, sont pris pour cible. Une méconnaissance du phénomène
de la toxicomanie dont est retenue comme seule définition la
définition législative : "usage illicite d'un produit
toxique", conduit à la prise en charge de jeunes consommateurs,
sans considération pour leur personnalité ou le type de
consommation (usage occasionnel de haschich ou d'anxiolytiques).
Nombre d'adolescents ont recours de nos jours à ces "transgressions"
devenues fait de culture, comme pouvaient l'être autrefois la
première cuite, la première cigarette. Assimiler prises
occasionnelles de toxiques et toxicomanie dans une prise en charge
identique et abusive nous paraît très dangereux. Un dialogue vrai
avec un interlocuteur sincère,
quelques paroles rassurantes et
bienveillantes auraient souvent suffi pour
aider le jeune à dépasser ces caps difficiles".
Ou
encore : « On ne peut mesurer les dégâts
psychologiques infligés à un individu dans la singularité de son
être, dans ses sentiments, dans sa possibilité de jugement, dans sa
structure psychique. Or, des méthodes comme celles de Drogue-stop,
basées sur une doctrine, ont pour but et pour résultat l'adhésion
de l'individu à un idéal abstrait ».
Est-ce
une suite de cette condamnation ? Toujours est-il que quelques années
après la clôture de cette procédure judiciaire, en 1991, fut créée
avec le soutien de l'église de scientologie l'association Non
à la drogue, Oui à la vie. Nous n'avons
pas connaissance de centres de soins gérés
par ladite association. Elle se présente comme une structure dédiée
à la prévention de la toxicomanie et des addictions, et distribue
gratuitement des livrets.
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consulté le 6 juin 2024 |
Elle
est reconnue d'intérêt général : les donateurs bénéficient-ils
de facilités fiscales ? Elle se présente sur sa page d'accueil
comme « parrainée par l’Église de
Scientology et soutenue par les scientologues du monde entier ». Sur son site, l'association encourage les dons et fait valoir des réductions fiscales accordées à toute personne qui donne à un organisme bénéficiant de cette reconnaissance. Elle bénéficie d'un avantage accordé par l'administration, alors qu'elle reconnaît qu'elle est parrainée par un mouvement ayant été condamné en tant que personne morale et dont, à maintes reprises, des responsables ont été sanctionnés au pénal. N'y aurait-il pas une étude juridique à mener afin de savoir si ces deux éléments sont compatibles ?
N'ignorons pas le droit existant : nous savons fort bien qu'en 2007 le tribunal administratif de Nantes a annulé un arrêté du maire d'Angers interdisant la publicité des organismes scientologues sur le territoire de sa commune. Nous n'ignorerons pas les principes et les dispositions légales garantissant les libertés publiques, mais la légitimité d'un avantage fiscal au profit d'une organisation scientologue nous semble devoir faire l'objet d'une étude approfondie.
Les
bénévoles qui se présentent aux abords des lieux où circulent
sportifs et publics sont-ils tous scientologues ? Nous ne pouvons
bien sûr pas l'établir. Il nous reste
maintenant peut-être à étudier le contenu des livrets distribués
pendant la période olympique au regard des impératifs de santé
publique. Nous ne saurions clore cette
réflexion sans renvoyer nos lecteurs à quelques documents
importants.
Une
étude parue sur le net et qui a pour auteur un docteur en histoire.
Elle inclut l'église de scientologie et présente
l'intérêt de relier sectarisme et addictions.
En
2012, le journal Sud-Ouest rapportait que le responsable
local de l'association non à la drogue et à la vie se
refusait à la
présenter comme
l'émanation de l'église de scientologie.
Nous
renvoyons également à l'étude
due
à Monsieur Gérard Cagni, addictologue et responsable du centre de soins spécialisés pour toxicomanes, société d'entraide et d'action psychologique à Dijon, ayant fait suite à l'intervention qu'il avait
bien voulu dispenser à Arches en 2006 lors de notre journée de réflexion consacrée
à la santé.
Nous mentionnons ici des références que nos jeunes lecteurs trouveront sûrement un peu éloignées dans le temps... Elles témoignent toutefois de la permanence de notre action, de nos recherches et de notre réflexion. En ce mois d'août 2024, aucun élément nouveau, à notre connaissance, ne les rend obsolètes.