Considérant qu’aux termes de l’article L. 212-1 du code de la
sécurité intérieure: «Sont dissous, par décret en conseil des
ministres, toutes les associations ou groupements de fait: […] 3o
Ou dont l’objet ou l’action tend à porter atteinte à
l’intégrité du territoire national ou à attenter par la force à
la forme républicaine du Gouvernement; […] 5o Ou qui ont pour but
soit de rassembler des individus ayant fait l’objet de condamnation
du chef de collaboration avec l’ennemi, soit d’exalter cette
collaboration; 6o Ou qui, soit provoquent ou contribuent par leurs
agissements à la discrimination, à la haine ou à la violence
envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur
origine, de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur identité
de genre ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie
ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une
religion déterminée, soit propagent des idées ou théories tendant
à justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette
violence; […]»; qu’en application de l’article L. 212-1-1 du
même code: «Pour l’application de l’article L. 212-1, sont
imputables à une association ou à un groupement de fait les
agissements mentionnés au même article L. 212-1 commis par un ou
plusieurs de leurs membres agissant en cette qualité ou directement
liés aux activités de l’association ou du groupement, dès lors
que leurs dirigeants, bien qu’informés de ces agissements, se sont
abstenus de prendre les mesures nécessaires pour les faire cesser,
compte tenu des moyens dont ils disposaient»;
Considérant
que l’association «Civitas», déclarée le 23 juillet 1999 et qui
s’est transformée en parti politique depuis la modification de ses
statuts en 2016, a pour objet d’œuvrer «en tant que parti
politique à promouvoir et défendre la souveraineté et l’identité
nationale et chrétienne de la France en s’inspirant de la doctrine
sociale de l’Eglise, du droit naturel et des valeurs patriotiques,
morales et civilisationnelles indispensables à la renaissance
nationale; mener conformément à ses objectifs à tous les échelons,
du local, national à l’international, toutes les actions qu’il
jugera utiles, y compris le soutien à des candidats à un scrutin ou
la participation à des élections»;
Considérant,
en premier lieu, que l’association «Civitas» appelle à entrer en
«guerre» contre la République afin de rétablir une monarchie, et
incite à recourir à la force pour y parvenir; que pour cette
association, les Droits de l’Homme ne sont pas autre chose que «des
outils de destruction de la civilisation chrétienne»; qu’afin de
réaliser son dessein d’établir cette «cité catholique […]
dirigée par un monarque», cette association appelle notamment dans
une vidéo publiée le 20 mai 2021 au «sursaut insurrectionnel» et
proclame «Nous devons 5 octobre 2023 JOURNAL OFFICIEL DE LA
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE Texte 3 sur 170 prendre part au combat… Nous
sommes en guerre parce que la République nous l’a déclarée, ça
n’est donc pas en son nom que nous devons contre-attaquer…
faites-le, faites-le en combattant […]»; que, le 8 janvier 2022, à
l’occasion d’une journée de formation avec la section
Sainte-Geneviève de Paris, M. B. a appelé à la mort des
gouvernants actuels qu’il qualifie «d’ennemis», en préconisant
le recours à des «outils de combat beaucoup plus radicaux, beaucoup
plus déterminés» inspirés des mouvements contre-révolutionnaires
et en prônant le recours à de «nouvelles voies de l’insurrection»;
qu’au nom de la défense de ce que l’association «Civitas»
présente comme ses valeurs, l’association organise des camps
d’été, à l’instar de celui qui s’est déroulé les 15 et 16
septembre 2017 à Saint-Martin-du-Lac (Saône-et-Loire), afin
d’entrainer ses militants au combat;
Considérant,
en deuxième lieu, que l’association «Civitas» organise des
rassemblements en hommage ou en soutien à des personnalités
emblématiques de la collaboration ou les présente comme des
références idéologiques, telles que Charles MAURRAS, régulièrement
cité, ou Robert BRASILLACH, présenté comme un héros; qu’ainsi,
le 6 février 2022, la chaîne YouTube de l’association «Civitas»
a publié une vidéo d’hommage à ce dernier, condamné à mort
pour intelligence avec l’ennemi, en le présentant comme victime
d’«un délit d’opinion» et «un poète immolé», «victime de
l’épuration Gaullo-communiste»; que, le 23 juillet 2022, une
délégation de 18 militants de l’association «Civitas», menée
par M. C., responsable de la section parisienne de l’association
«Civitas», s’est rendue au cimetière de Port-Joinville (85) sur
l’Île-d’Yeu (85), afin de célébrer le 71e anniversaire de la
mort du Maréchal PÉTAIN; que, devant un drapeau tricolore orné de
la Francisque, il a pris la parole pour vanter le «destin cruel» du
«grand défenseur de la patrie» qui a «dû résister pied à pied
à la pression nazie pendant 4 années»; que cette posture
d’exaltation de la collaboration se retrouve encore dans
l’appellation des rassemblements de l’association «Civitas»
dénommés «Fête du Pays Réel», en référence au journal de Léon
DEGRELLE, chef du mouvement belge REX dans les années 1930,
collaborateur de l’Allemagne nazie, proche d’Hitler et engagé
volontaire dans la Waffen SS; que M. D., ancien président de
l’association «Jeunesses nationalistes», dissoute le 25 juillet
2013 pour exaltation de la collaboration avec l’ennemi et
provocation à la haine raciale, et candidat de «Civitas» aux
élections législatives de 2017, se réfère lui aussi à Léon
DEGRELLE dans une vidéo mise en ligne le 2 avril 2019 sur la chaîne
YouTube de l’association «Civitas»;
Considérant,
en troisième lieu, que l’association «Civitas» promeut une
idéologie consistant à hiérarchiser les êtres humains, promeut
l’infériorité des communautés juive et musulmane présentées
comme des menaces pour la société, et ce faisant, tient un discours
ouvertement antisémite, gravement hostile aux musulmans et d’une
manière générale xénophobe; qu’afin de diffuser cette
idéologie, l’association reprend de façon virulente la thématique
du pouvoir qui serait «aux mains des juifs», une telle rhétorique
antisémite ayant notamment été développée par M. E., proche
d’Alain SORAL, dans sa conférence donnée le 24 mars 2018 à
l’occasion de la 2e Fête du Pays Réel, par M. B., dans des vidéos
mises en ligne les 12 juillet et 17 octobre 2018 sur la chaîne
Youtube de l’association «Civitas», ou encore par M. F., qui
intervient très régulièrement dans les réunions de l’association
«Civitas», dans une vidéo mise en ligne en octobre 2020 sur la
chaîne Youtube de l’association et qui a fait l’objet de
nombreux commentaires approbateurs, nullement modérés; qu’en
outre, l’association véhicule par l’intermédiaire de ses
intervenants des propos à teneur négationniste; qu’ainsi, dans
une vidéo publiée le 18 mai 2021 sur la chaîne YouTube de
l’association «Civitas», M. F. a présenté la Shoah comme un
dogme qui devrait pouvoir être remis en question; qu’enfin, lors
de la 5e université d’été de l’association «Civitas» qui
s’est tenue à Pontmain (Mayenne) en juillet 2023 plusieurs
conférenciers ont tenu des propos à la teneur antisémite assumée;
qu’à cette occasion, M. B. a déclaré «En avril 2020, Lord Jacob
ROTHSCHILD s’est fait prendre en photo avec la grande prêtresse
satanique Marina ABRAMOVIC au Royal Academic of Art devant la toile
intitulée: Satan convoque ses légions», «Tous les ans depuis que
Georges SOROS et ses amis ont financé l’immigration massive sur le
continent américain et le continent européen, il disparait 85000
enfants, tous les ans. […]»; qu’au cours de ce même
rassemblement, M. G., invité de l’association «Civitas», a
présenté les juifs comme les enfants du Diable obéissant à ses
desseins et insinue clairement que la pandémie de la Covid 19 leur
serait imputable; que notamment il a indiqué «En France la pandémie
a été déclarée le 11 mars 2020, c’était Pourim 5780, le jour
le plus heureux des juifs, coïncidence, c’est peut-être une
coïncidence, je ne sais pas, le fait il est là (…)»; que, de
même, à cette occasion, M. H., invité de l’association
«Civitas», a tenu des propos de nature à susciter un sentiment de
haine et de rejet envers la communauté juive, instillant l’idée
que leur naturalisation serait à l’origine de toutes les dérives
qu’a connues la France postérieurement «… 1791, vous avez eu un
évènement, septembre 1791, la naturalisation des juifs. Avant 1789,
un juif, un musulman, un bouddhiste, etc, ne pouvaient pas devenir
français. Pourquoi? Parce que c’étaient des hérétiques. Et la
naturalisation des juifs en septembre 1791 ouvre la porte à
l’immigration […] Et évidemment si on rétablit les lois de
catholicité, et qu’on fait du catholicisme traditionnel la
religion d’Etat, peut-être faudrait-il retrouver la situation
d’avant 1789»;
Considérant,
en quatrième lieu, que l’association «Civitas» diffuse une
idéologie hostile aux personnes de confession musulmane, et
présentant les étrangers, réels ou supposés, comme des
terroristes ou des assassins et appelle à des actes de violences à
leur égard; que dans une vidéo mise en ligne le 5 avril 2019 sur
Youtube, M. I., invité par l’association «Civitas», légitime
leur discrimination en affirmant que «nous avons le choix entre
discriminer et disparaître»; que dans une vidéo mise en ligne le
11 février 2022 sur la chaîne YouTube de l’association «Civitas»
et intitulée «La France en danger d’Islam», cette religion est
présentée comme «le fléau du christianisme, là où il passe le
christianisme meurt»; que, de même, l’association «Civitas» a
publié sur sa chaîne Youtube, le 1er août 2023, une vidéo dans
laquelle M. J., invité de l’université d’été 2023, compare
les musulmans à des envahisseurs: «[…] Le projet de Bill Gates
d’obscurcir le soleil, vacciner la population mondiale, celui de
Georges SOROS de faire envahir les pays occidentaux par des hordes de
musulmans et saper la famille naturelle en finançant le mouvement
woke et LGBTQ»; qu’en outre l’association «Civitas» pratique
un amalgame entre immigration, criminalité et terrorisme; qu’ainsi,
dans une vidéo mise en ligne en mai 2018 sur la chaîne YouTube de
l’association, M. D. évoque les «Terroristes évidemment
d’origine étrangère naturalisés 5 octobre 2023 JOURNAL OFFICIEL
DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE Texte 3 sur 170 Français depuis l’année
2010, évidemment»; que, le 29 octobre 2020, à Lyon, à l’occasion
d’un rassemblement de militants de l’ultra-droite à l’initiative
de M. D., afin de rendre hommage aux victimes de l’attentat survenu
le jour même à Nice (06), deux banderoles ont été déployées:
«smash your local islamist» et «remigrons-les»; que lors de la
manifestation organisée à Callac (22) à l’automne 2022,
l’association «Civitas» a déployé une pancarte sur laquelle
était écrit «l’immigration tue»;
Considérant,
en cinquième lieu, que l’association «Civitas» tient
régulièrement un discours ouvertement homophobe, comparant
l’homosexualité à une maladie ou une perversion de la société;
qu’ainsi, le 18 novembre 2012, à Paris, M. B. a pris la parole
devant ses militants pour dénoncer «la normalisation de
l’homosexualité» qui «déroge de la norme humaine»; que le 26
mai 2013 des militants de l’association ont défilé aux côtés
des membres des «Jeunesses Nationalistes» pour protester contre le
mariage homosexuel, ces derniers brandissant des pancartes mettant
sur le même plan la zoophilie, la polygamie et le mariage
homosexuel, notamment une pancarte avec une image de singe indiquant:
«Le mariage pour tous? Et pourquoi pas pour lui? Tant qu’on y
est»; que, dans une vidéo mise en ligne sur la chaîne YouTube de
l’association «Civitas» le 12 février 2023, Mme K. a dénoncé
«une nouvelle bolchevisation de nos sociétés par le mondialisme,
par le covidisme, par le transhumanisme, le lgbétisme, le néo
communisme social»; qu’à l’occasion d’une publication en date
du 5 avril 2023 sur son compte Facebook, l’association «Civitas»
se réjouit de l’annulation du concert de Bilal HASSANI prévu à
Metz dans une église désacralisée en qualifiant l’artiste de
«travesti marocain», propos qui ont fait l’objet de plusieurs
plaintes contre l’association «Civitas» pour «discrimination en
raison de l’identité de genre», «provocation publique et directe
à commettre un crime ou un délit», «provocation à la
discrimination, à la haine ou à la violence», «menace et
harcèlement» et d’une auto-saisine du parquet de Metz pour les
mêmes chefs d’incrimination; qu’enfin, lors de l’université
d’été 2023 de l’association «Civitas», plusieurs intervenants
ont tenu des propos homophobes retransmis sur la chaine Youtube de
l’association; qu’à cet égard, notamment, M. B. a associé la
communauté LGBTQ à Satan et la transformation de genre à des
rituels sataniques (vidéo publiée le 2 août 2023); que M. G. a
présenté l’homosexualité comme «le rendez-vous de toutes les
hérésies» et a indiqué que «toutes les perversions se trouvent
dans l’arc-en-ciel» (vidéo publiée le 5 août 2023);
Considérant,
enfin, que l’association «Civitas» compte parmi ses membres et
soutient des personnalités diffusant un discours haineux et
discriminatoire, dont plusieurs ont fait l’objet de condamnations
pénales à ce titre; qu’il en est ainsi de Mme K., condamnée pour
provocation à la haine raciale à une peine de six mois
d’emprisonnement avec sursis par le tribunal correctionnel de Metz
après avoir brandi le 7 août 2021 une pancarte antisémite à
l’occasion d’une manifestation contre le pass-sanitaire, le
hashtag «JeSuisK» ayant repris par de nombreux comptes Twitter ou
même lors de manifestations et la vidéo de soutien à Mme K. mise
en ligne par l’association «Civitas» ayant fait l’objet de
commentaires à teneur anti-israélienne ou antisémite non modérés;
que pour autant, bien que condamnée, l’intéressée a ensuite été
promue responsable régionale Grand Est de l’association «Civitas»
en janvier 2022 et le site de l’association «Civitas» a publié
une vidéo intitulée «Pèlerinage de la section Moselle à
Domrémy», dans laquelle elle soutient M. L., condamné pour propos
antisémites, et tient elle-même un discours anti-juifs; que de
même, à l’occasion de l’annonce de son retrait de la vie
publique le 1er mars 2023, M. B. l’a enfin chaudement remerciée
«pour les belles batailles qu’elle a menées sous la bannière de
Civitas» faisant siens ses propos; que de la même façon,
l’association «Civitas» soutient M. D., ancien président de
«Jeunesses Nationalistes», association dissoute le 25 juillet 2013
sur le fondement du 6o de l’article L. 212-1 du CSI, condamné en
2015 à 2 mois d’emprisonnement pour organisation d’une
manifestation en dépit d’une interdiction préfectorale et en 2018
à 30 jours-amende de 50 euros pour reconstitution de ligue dissoute,
ou M. M., conseiller doctrine de l’association «Civitas»,
condamné en 2016 à 2 000 euros d’amende avec sursis pour injure
raciale;
Considérant
que ces agissements, ces différentes prises de position ou
publications mises en ligne sur les comptes officiels de
l’association «Civitas», qu’ils émanent de l’association, de
ses membres ou des personnalités qu’elle invite à s’exprimer
pour son compte, ainsi que les commentaires générés par son
activisme en ligne, dès lors qu’ils n’ont pas fait l’objet
d’une quelconque modération ou condamnation de la part de
l’association, entrent également dans le champ de l’article L.
212-1-1 du code de la sécurité intérieure;
Considérant
qu’au regard de l’ensemble des éléments qui précèdent, il y a
lieu de prononcer la dissolution de l’association «Civitas» sur
le fondement des 3o, 5o et 6o de l’article L. 212-1 du code de la
sécurité intérieure;
Le
conseil des ministres entendu, Décrète:
Art.
1er. – L’association «Civitas» est dissoute.
Art.
2. – La Première ministre et le ministre de l’intérieur et des
outre-mer sont responsables, chacun en ce qui le concerne, de
l’application du présent décret, qui sera publié au Journal
officiel de la République française.
Fait
le 4 octobre 2023.
EMMANUEL
MACRON Par le Président de la République :
La
Première ministre, ÉLISABETH BORNE 5 octobre 2023
Le
ministre de l’intérieur et des outre-mer, GÉRALD DARMANIN
JOURNAL
OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Nota.–L’identité des personnes mentionnées dans les motifs du
présent décret figure dans le texte intégral du décret notifié
aux représentants de l’association dissoute.