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vendredi 5 octobre 2012

reportage de CHARENTE LIBRE avec nos remerciements





Visite non autorisée au coeur des Jéhovah
CL s'est invité discrètement à une assemblée de l'organisation controversée des Témoins de Jéhovah. 4.500 personnes avaient fait le déplacement ce week-end à Angoulême


Une voix magnétique dans un silence de cathédrale. Celle du type en chemise, au loin sur l'estrade. Sous le ciel noir imposé par le plafond, la foule assise ne voit que lui. 4 500 visages aimantés par un discours fleuve et presque indifférents à cette scène étrange, samedi après-midi, au milieu de la salle. Une douzaine de personnes, en cercle, qui tiennent un drap blanc et dissimulent quelqu'un, allongé sur le sol. Un arrêt cardiaque.
Ce week-end, venus de tout le sud-ouest, les Témoins de Jéhovah étaient à Angoulême, dans les rues du centre-ville, dans les grandes surfaces, mais surtout, pendant trois jours, en assemblée à l'espace Carat.
Pour s'approcher, deux options. Le verrou poli, mais absolument hermétique, du service de communication. Ou la chance, le pas franc et la chemise rentrée dans le pantalon, avec une réponse pour convaincre les gars de la sécurité: «Je viens pour écouter. C'est mon coeur qui m'a conduit ici».
Dans la salle comble, aucun décor particulier. Aucun signe religieux. Rien de rien, sauf cette banderole, sur le podium: «Préserve ton coeur !». Sur le badge que chacun doit porter, avec son nom et sa ville, les mêmes mots: «Préserve ton coeur !». Tout le monde écoute l'homme au micro, seul sur la scène. Il parle lentement, d'une voix agréable, du ministère chrétien et de nonchalance, du vent de la trahison et d'adultère.
Les pompiers arrivent, mais le discours se poursuit. Derrière le drap, ils interviennent. Ce coeur-là n'aura lâché que quelques secondes. Des mots résonnent depuis la scène. «Sa nonchalance spirituelle l'a rapproché du Diable».
Le public n'a rien d'atypique. Pas de signes extérieurs de marginalité ou de folklore bigot. Il y a des jeunes femmes en jupes, des gosses encore en couches, bien sûr une majorité de retraités avec des bibles. Et puis ces hommes en costard crème, qui circulent entre les rangs avec leur talkie et une allure paradoxale de mafieux sans vice, d'hommes de mains victime d'arthrose.
Avec son illusion d'apparente normalité, l'assemblée rappelle ces congrès d'actionnaires qu'on voit parfois. Ce n'est pas une vue de l'esprit. Les Témoins de Jehovah sont, à quelques détails près, une multinationale, Watchtower, dont le siège mondial se trouve à New York.
Un autre homme a pris le micro. Le sujet de son intervention: «Le service à plein-temps, c'est bon pour le coeur». Traduction: faire du porte à porte ou une autre activité au service de la société Jéhovah et ses filiales amène à la «vie éternelle».
Sur l'estrade, Justine vient témoigner.
- Depuis petite, j'ai toujours été passionnée par les chevaux. Cela m'empêchait d'offrir un coeur complet à Jéhovah.
- Tu as pris des mesures radicales ?
- J'ai tout arrêté.
Même topo avec Jean-Pierre, un retraité qui a diminué le bricolage pour «garder une bonne relation avec Jéhovah».
Invités à abréger leurs études et à se dérober si possible aux métiers profanes, en résumé, n'être plus que les «compagnons de travail de Jéhovah», les Témoins sont surtout incités à se méfier des autres. Des autres, de la philosophie et des vaccinations, des transfusions sanguines et des «oeuvres de la chair».

Une mécanique d'isolation sociale
Avant d'aller taper à votre porte, les Témoins de Jéhovah sont priés de balayer devant la leur. «Jeune, tes seuls amis sont Jéhovah et ceux qui le servent», répète l'homme au micro, qui vitupère camarades de classes et autres «stupides» (sic) partisans de l'évolution, «cette conception tordue», ou «amis du diable» qui pensent que «l"homosexualité est un mode de vie comme les autres».
Toute une mécanique d'isolation sociale qui est le fonds commerce de l'organisation. Une rhétorique parfois grossière vue de dehors, témoin sans être Témoin, mais qui semble fonctionner à merveille sur ce «peuple de Jéhovah» estimé à un millier de membres en Charente.
Les manifestations de masse, comme celle de Carat ce week-end, sont le prix de ce recrutement permanent. Une manière de rassembler les fidèles avant de les éparpiller dans les rues et les couloirs d'immeubles, en mission d'évangélisation. Une vieille logique de parti politique selon laquelle persuader les autres est la meilleure manière de se persuader soi-même.
Sur la scène, avant de conclure l'après-midi, un intervenant présente un DVD pour «inculquer la parole de Dieu dans les petits coeurs». «Vous allez être scotché, promet-il. Si vous connaissez les studios d'animation Pixar, c'est de ce niveau-là».
Les Témoins de Jéhovah savent aussi vivre avec leur temps. Et prendre le meilleur d'un monde dont ils tentent pourtant de s'arracher. Un monde dont ils ont souvent prédit la fin, toujours imminente.
La dernière fois, l'apocalypse (Armageddon) était prévue pour l'année 1975. D'après nos informations, elle n'aurait eu lieu qu'à l'intérieur de l'organisation: déçus de ne pas voir des boules de feux fondre sur leurs têtes, 500 000 Témoins avaient alors quitté le mouvement.



Lien  ICI vers l'article de CHARENTE LIBRE sur le site du journal avec les illustrations et la discussion sur le forum.

1 commentaire:

  1. Bonjour,

    Les Témoins de Jéhovah ne vivent pas en communauté : ils passent 8h par jour avec des collègues de travail qui ne sont pas Témoins de Jéhovah. De plus, leurs enfants sont scolarisés à l'école publique et fréquentent l'université. On ne peut donc pas parler de "mécanique d'isolation sociale" les concernant.

    Amicalement,

    Jacques

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