MISSION
INTERMINISTERIELLE DE VIGILANCE
ET DE
LUTTE CONTRE LES DERIVES SECTAIRES
NE LA
LAISSONS PAS DISPARAITRE !
témoignage
Le
cercle laïque pour la prévention du sectarisme et la fédération
des œuvres laïques de l’Ardèche-Ligue de l’Enseignement ont
toujours mené depuis une quinzaine d’années un combat commun
contre le sectarisme. Nos deux associations sont concernées au
premier chef par le projet qui devrait se concrétiser d’ici la fin
de l’année 2019 et qui verrait la dissolution de la mission
interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives
sectaires et son absorption par la cellule du ministère de
l’intérieur dédiée à la radicalisation.
Pour
rappel, en 1992 un arrêt du Conseil d’État reconnaissait la
légitimité d’une subvention de l’État au Centre contre les
manipulations mentales, en raison des dangers que les groupes
communément appelés sectes en reprenant les termes de la Haute
Assemblée, faisaient courir à la population, et à la jeunesse en
particulier.
La Cour
européenne des droits de l’Homme n’a pas condamné la France
lorsqu’elle fut saisie de la requête par laquelle fut contestée
la reconnaissance d’utilité publique de l’UNADFI (1998) : « la
Cour souligne que la liberté de religion garantie par l’article 9
de la Convention n’inclut pas un droit d’être à l’abri des
critiques, la liberté d’expression constituant également un droit
fondamental dans une société démocratique. »
Puis,
suite au rapport Guyard sur les sectes en France, fut créé
l’observatoire interministériel des sectes. La mission
interministérielle de lutte contre les sectes lui succéda; elle fut
ensuite remplacée par la Miviludes que nous connaissons.
Nous
avons très régulièrement été amenés à solliciter les
personnels de la Miviludes et nous ne pouvons que nous féliciter de
leur disponibilité, de leur expertise comme de leur réactivité.
L’implication
de ses fonctionnaires, leur sérieux et leurs avis toujours fermement
et soigneusement nuancés, nous ont toujours été infiniment
précieux, comme sont devenues précieuses toutes leurs publications.
Qu’il
me soit permis d’apporter un témoignage. L’un des arguments
parfois avancés était une préconisation de la Cour des Comptes.
Avec une poignée de conseillers, la Mission est est-elle une charge
aussi lourde ? Nous avons tous été amenés à saisir à un moment
ou un autre ses agents.
Nous
avions toujours des retours assez rapides, agrémentés en guise
d’introduction de la formule suivante : Comme vous le savez et
conformément au principe de laïcité, la MIVILUDES s’interdit de
porter quelque jugement de valeur que ce soit sur les doctrines, les
théories ou les croyances en tant que telles, son objet étant de
dénoncer systématiquement les dérives sectaires et de lutter
contre elles. Le seul contenu doctrinal n’étant pas suffisant pour
caractériser un risque de dérive sectaire, le travail de vigilance
et de lutte mené par la MIVILUDES prend appui sur la concordance de
certains critères de dangerosité que vous connaissez parfaitement.
Et des
retours étaient parfois envoyés par courrier électronique à des
heures qui excédaient largement les horaires habituels imposés à
un fonctionnaire ! La FOL de l’Ardèche-Ligue de l’Enseignement a
également eu l’occasion de les apprécier.
Alors
non, non et non ! L’argument d’une meilleure utilisation des
fonds publics, venant des magistrats financiers, ne tient pas. Se
priver de fonctionnaires qui ne comptent pas leurs heures, qui ont
acquis en se passionnant pour leur travail une expérience
irremplaçable, n’est-ce pas là une forme de gaspillage ? Il nous
semblerait qu’ici la Cour des comptes ait fait un geste politique
et non pas un effort d’amélioration de l’utilisation des
finances publiques. Et le Gouvernement en suivant ces préconisations,
si préconisations il y a eu, encore plus.
Mais il
y a plus grave encore. L’une des tâches qui incombent à la
République, c’est la protection des plus faibles. Peut-être
excédons-nous notre objet statutaire, mais par notre expérience
militante dans ce cadre nous nous sentons fondés à penser que nous
assistons en ce moment à une régression du rôle de l’État dans
cette mission régalienne.
Aujourd’hui
le gouvernement détricote un outil destiné à prévenir l’emprise
mentale, à aider des victimes et leurs familles, et à être
l’interface entre les associations de défense comme la nôtre et
l’administration. Pour défendre les libertés individuelles ?
Peut-être s’agit-il alors de défendre « le renard libre dans le
poulailler libre ».
Supprimer
la Mission, c’est abandonner l’aide aux victimes d’emprise,
d’embrigadement. C’est pour nous une atteinte à la liberté de
penser , donc à la laïcité. Et du fait des multiples atteintes
générées par les dérives sectaires au droit du travail (pouvant
mener à la servitude volontaire) à l’intégrité psychique et
physique des personnes, c’est une atteinte aux droits de l’homme.
Et faut-il rappeler que c’est le droit du travail, auquel nous
sommes attachés, qui a maintes fois permis de protéger les
personnes sous emprise qui, sous couvert de bénévolat, ont été
privées de leurs droits sociaux, voire de leurs droits fondamentaux
?
Nous
savons que nous pouvons compter sur la solidarité de nos amis de
l’association noiséenne de défense et de protection contre les
sectes en Seine-Saint-Denis. Même si la décision annoncée est
suivie d’effet, (nous espérons encore un revirement), le CLPS et
la FOL de l’Ardèche-Ligue de l’Enseignement, comme l'association
noiséenne ne relâcheront pas leurs efforts en vue d’un
rétablissement de cette instance qui nous a donné, il nous importe
de le rappeler avec force, entière satisfaction.
GILBERT
KLEIN
La
teneur de ce témoignage est partagée par
LE
CONSEIL NATIONAL DES ASSOCIATIONS FAMILIALES LAÏQUES (CNAFAL)
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